

Un territoire, une race l’Aubrac
L’Histoire de l’Aubrac
Partant d’un milieu naturel spécifique alliant et reliant le minéral, le végétal et l’animal, nos ancêtres par leur savoir-faire et leur volonté assurent la ressource qui conditionne le peuplement. Les bœufs fournissent l’énergie, les vaches donnent une partie de leur lait qui, transformé en fromage, se conserve. De l’ensemble du troupeau dépend la fertilisation. On obtient ainsi durablement les biens vivriers essentiels pour la vie des familles d’éleveurs.
Au milieu du siècle dernier surgissent des évolutions qui ébranlent l’ordre établi. Ces orientations, s’appuient sur l’avènement du moteur, les engrais chimiques et les projets de l’industrie agro-alimentaire. Elles constitueront les bases initiales de la Politique Agricole Commune (PAC). A cette époque il semble que l’Aubrac n’a plus un grand avenir. Le bœuf de trait, le fromage, les couteaux, anciens piliers de l’économie s’effondrent en entraînant la régression de la race locale.
Pour faire progresser l’agriculture, un schéma unique est diffusé en tout lieu : l’objectif est d’arriver à quatre races bovines en France. L’Aubrac ne sera plus admise au Salon de l’Agriculture et les « persévérants » de cette race n’auront plus accès aux crédits publics.
Seulement, après deux décennies, le climat, le relief et la nature des sols ne se sont pas modifiés et les retours issus des systèmes très intensifs ne sont pas souvent à la hauteur des objectifs programmés.
Dans les années 1975 – 80, une prise de conscience collective s’affirme sur l’Aubrac « On ne peut valablement assurer l’avenir économique d’un territoire de montagne sans revenir à des systèmes montagnards. Pour cela, il faut sans doute laisser tomber un peu le prêt-à-porter et, avec le patrimoine en référence, revenir à plus de sur-mesure ». C’est ainsi que vont être sollicités les appuis scientifiques dans un but de relance et de sauvegarde des savoir-faire.
L’évolution de la race s’est affirmée en 1892 avec la création du herd-book (le livre généalogique de la race).
Vers 1960, avec la suppression de la traction animale et de la traite des vaches, les éleveurs envisagent l’Aubrac comme une race destinée à la production de viande. C’est alors que commencent les croisements avec des mâles de race à viande. Cependant, l’expérience montre qu’il est nécessaire de sauvegarder la race Aubrac, avec sa structure génétique individualisée, caractérisée par la fécondité, la longévité et la rusticité.
Le renouveau grâce à la coopérative Jeune Montagne et à L’Union Aubrac
Dans les années 60, constatant la fin des burons, André Valadier fédère quelques producteurs désireux de sauver leur fromage. Ensemble, ils créent la coopérative Jeune Montagne. Leurs efforts sont couronnés de succès mais la mise en place des quotas laitiers vient enrayer la mécanique. La coopérative réagit, car elle a besoin de lait issu du territoire pour répondre à la demande du consommateur. Elle met en place un fond de soutien qui paie les amendes à la place des producteurs qui dépassent le quota.
La race Aubrac est liée à son mode d’élevage, la traite de la vache se fait avec son veau. Il fallait sauvegarder cette production alors que les orientations laitières voguaient sur un autre courant. L’Aubrac principalement sélectionné pour sa viande perd de ses caractéristiques laitières. Aussi, en étudiant les liens entre la génétique, l’alimentation et la qualité du lait, les éleveurs ont trouvé un type de vache adapté au contexte local. Ils repèrent des vaches Simmental qui correspondent à leurs objectifs.
Aujourd’hui la coopérative Jeune Montagne collecte 800 tonnes de lait avec 3500 vaches traites et 80 éleveurs. Une démarche de réintroduction des vaches Aubrac est en cours, l’objectif est de parvenir à 10 % vers 2013. Jeune Montagne transforme ainsi ce lait pour faire du fromage de Laguiole AOP et de l’Aligot, sous l’appellation Aligot de l’Aubrac qui a été lancée avec succès en 1982 et qui fait aujourd’hui l’objet d’une demande d’IGP.
Le maintien de la race pure s’est fait avec la création en 1979 de l’Union Aubrac afin d’améliorer les schémas de sélection. De nouveaux outils sont créés, dont la station de contrôle individuel des jeunes taureaux.



Un moteur de développement
Aujourd’hui, la race Aubrac est le symbole et le moteur de l’économie et du développement de l’Aubrac. La dynamique des coopératives, des groupements de producteurs, de l’UPRA, repose sur la volonté de maintenir et de valoriser cette race et ses produits sur son territoire. Les produits AOC, IGP ou les labels sont une source potentielle de l’économie locale. C’est parce que les acheteurs voient le lien avec le territoire qu’ils accordent aux produits une valeur plus grande que s’ils étaient « hors sol ». Ce constat est valable pour la viande, le fromage, l’aligot mais aussi le couteau, la gastronomie et le tourisme.
L’Aubrac montre qu’un territoire qui associe le développement technologique et la valorisation de son patrimoine naturel dans une dynamique collective peut retrouver un développement territorial remarquable. Ce potentiel de ressources devrait être renforcé par la création du Parc Naturel Régional de l’Aubrac.